Jalousie en trois mails

"Nous construisons notre enfer avec nos seuls désirs." (Helen, scène 43)

Ma vision du projet-


Il y a presque trente ans déjà, le jeune héros de la "Brève histoire d'amour" épiait sa belle voisine de l'immeuble d'en face à l'aide d'un téléscope, n'hésitant pas à s'immiscer dans son intimité. L'immense réalisateur polonais Kieslowski a vu juste, en prédisant dans son chef d'oeuvre une société remplie de grands solitaires animés faussement d'une dose quotidienne de voyeurisme.



Ici, trois femmes aux trois âges différents, et seules dans leur appartement, attendent leur homme, le même. Tous les ingrédients, le titre de la pièce inclus, sont réunis pour construire un "vaudeville" léger et plein de quiproquos.



On y est presque si on ignore leur solitude extrême, dans cette immobilité digne et stoïque. Si on oublie aussi ce sentiment d'angoisse que de se retrouver un jour dans "la gigantesque fausse commune, pas aimée, pas désirée, seule".



Proposer ces chambres anonymes, design et froides qui semblent se succéder à l'infini, c'était pour moi, mettre aussi le spectateur dans le rôle de voyeur, du côté du quatrième mur. Il participe ainsi activement à toute la laideur des relations, la jalousie excessive et à la surveillance mutuelle en prime, où "l'homme n'est guère qu'un trophée".



Supprimer la présence des ordinateurs sur scène, pourtant le seul moyen de communication de ces trois personnages, c'était une évidence dans ma proposition scénographique. A la place je préférais illustrer autrement cette étrange échange instantané. On peut se voir, toucher, parler. Oui. Mais uniquement à travers une vitre bleuâtre. En restant toujours chez soi. Seul(e). Comme dans une salle d'attente. Ou dans une cabine de dépistage du cancer. Ces étranges lieux froids, anonymes et inhumains.



La réussite sociale n'est qu'un leurre. On tentera d'exister grâce à la jouissance stérile de ces brêves histoires d'amour sur la banquette design, face au public, réduit à l'image.



Renata Gorka.



Etape 1 : La maquette+
Etape 2 : Le spectacle+