"Si vous ne pouvez vous résoudre à abandonner le passé, alors vous devez le recréer. C'est ce que j'ai toujours fait."
(Louise Bourgeois)
L'art n'appartient et n'apprend rien à personne, ce n'est qu'un miroir qui nous regarde, où chacun de nous peut se voir en disant : c'est moi.
L'univers visuel de mes scénographies vient avant tout de l'homme, c'est lui qui le porte. Lui seul. Ici, seul en scène, Lui : frais, rajeunit, impeccable, beau. Et pourtant double dans cette étrange identité, en le regardant nous avons l'impression à la fois de la virilité hors norme et de la fragilité presque enfantine. Seul, puisqu'il n'est plus "qu'une maison hantée des amis perdus à jamais" où le vide est "devenu pour lui ce qui est le plus peuplé". Seul, puisque tout ce qu'il lui reste de sa mère morte, ce n'est que lui-même.
Louise Bourgeois
Dès la première lecture de ce texte exceptionnel, je portais en moi l'image de la tragédie grecque, où en sachant la fin inévitable et sans issue, nous voulons y croire. Encore et malgré tout. Malgré nous. Ne sommes nous pas tous condamnés à mort ?
Anselm Kiefer
Le fils errant sur les catacombes de son passé nous fera donc revivre sa mère et nous faire sentir son existence jusqu'à l'odeur de sa dernière gauloise. Mais le sujet de cette pièce si intime est tellement plus vaste que la relation entre la mère seule et son fils unique... C'est une histoire de tentation. C'est l'histoire de quelqu'un qui a osé s'envoler un jour malgré le désespoir de ce monde et malgré ses ailes brûlées jusqu'aux cendres. Mon devoir d'artiste est de montrer la beauté hypnotique de cette horreur.
Voici devant vous l'absurdité de la guerre au sens pluriel et son vestige, la carcasse douloureuse, abandonnée et sans aucune gloire.
La faire revivre, c'est de dire : "J'ai vécu."
Renata Gorka, scénographe